Le vaisseau fantôme

C'est une masse silencieuse, qui se déplace lentement, sans but, celle des invisibles.
Vous pouvez les trouver dans les coins, entre les ruelles, sur les places, à côté des voies de la gare.
Mais aussi à la caisse d'un supermarché, à l'entrée d'une discothèque, dans un magasin de vêtements, sur l'échafaudage d'un immeuble en construction.
Certains dorment dans un lit qui ne leur appartient pas, d'autres ont une place mais seulement jusqu'au matin, d'autres encore la trouvent dans l'entrée d'un palais, dans une maison abandonnée, sous les porches de l'avenue principale ou dans le coffre d'un flixbus.
Ils sont de tous âges, de diverses ethnies, de différentes religions et pourtant tous partagent une colère, un sentiment d'injustice, d'irrésolu.
Et ainsi ils continuent, sans se décourager, chaque jour avec la même routine, chaque jour avec les mêmes difficultés. La société les laisse dans le coin, les méprise, fait semblant de ne pas les voir : elle dégage les gares, jette les couvertures, distribue à tous d'innombrables feuilles d'interdictions de séjour dans la ville, qui sont ponctuellement ignorées. Gérer le "problème" sans vraiment le gérer, en effacer seulement les traces, le déplacer loin des yeux de tous.
Pourtant, les sans-abri restent sans abri, ils continuent à errer dans les rues, à demander de la nourriture et des vêtements. Chacun ramène avec soi ses problèmes : physiques, psychiques, d'humeur ou encore de rage pour sa condition ou pour le temps perdu, gaspillé, jamais eu.
Pourtant, cela ne semble pas avoir d'importance.
C'est un soir comme les autres, mais la gare est déserte.
Trois voitures de police, deux de la Guardia di Finanza et une voiture des carabinieri. Tout est silencieux, il n'y a pas de musique, on ne voit personne sauf les quelques âmes solitaires qui attendent leur bus pour rentrer à la maison.
Pourtant, il suffit de se déplacer de quelques mètres et les gens sont là, ceux qui sont assis sur le sol et ceux qui sont appuyés contre le mur, ceux qui ont été accueillis dans une structure d'urgence et ceux qui ont été obligés de construire un nouveau lit juste un peu plus loin du précédent.
Comme un navire fantôme, toutes les âmes ne lâchent pas, elles continuent imperturbablement leur navigation en essayant de rester à flot même si la mer est agitée, malgré la force des vagues. Parfois la tempête semble se calmer, mais ce n'est qu'une illusion, et pourtant cela ne semble pas intéresser les marins.
Leurs bateaux sont à moitié cassés, entaillés par le sel et les coups mais ils sont toujours là, ils résistent encore, ne se laissent jamais vraiment couler, restent sur la surface de l'eau. Et tandis que des vies humaines sont traitées comme de simples déchets, les gens continuent leur vie et leurs batailles. Même souffrance, mêmes problèmes, mais cachés aux yeux de tous.
C'est le grand paradoxe de la société moderne : éliminer la fragilité parce qu'elle fait peur, parce qu'elle reflète une vérité inconfortable, parce qu'elle rappelle que nous pourrions tous, au fond, nous retrouver sur le même vaisseau à la dérive. Et alors on fait semblant qu'il n'existe pas, on préfère une intervention temporaire à une solution réelle, pendant que le navire continue de naviguer, sans une direction, sans un port sûr où accoster, rejetée par chaque institution, rebondi d'une entité à l'autre, comme si cette cargaison humaine pouvait être déchargée, oubliée, éliminée. Et pourtant il reste, silencieux mais déterminé, vivant.
Il vascello fantasma
È una massa silenziosa, che si muove lenta, senza una meta, quella degli invisibili. La si incontra negli angoli nascosti delle città, tra i vicoli in penombra, nelle piazze attraversate di fretta, accanto ai binari delle stazioni dove nessuno si ferma davvero a guardare. Ma anche alla cassa di un supermercato, davanti all'ingresso di una discoteca, in un negozio di abbigliamento, sopra l'impalcatura di un condominio in costruzione. Alcuni dormono in letti che non sono i loro, concessi solo per una notte; altri si arrangiano con un angolo trovato per caso, un androne, una casa abbandonata, un portico, o perfino il bagagliaio di un flixbus.
Sono persone di tutte le età, con provenienze, lingue e religioni diverse, ma tutte accomunate da uno stesso nodo di rabbia, da un senso costante di ingiustizia, da qualcosa di irrisolto che le accompagna come un'ombra. E così vanno avanti, imperterrite, giorno dopo giorno, con la stessa fatica, affrontando le stesse difficoltà come se fossero parte inevitabile della loro esistenza. La società le lascia ai margini, le guarda con sospetto o le ignora del tutto; le disprezza, le evita, le sposta, le allontana. Sgombera le stazioni, getta via coperte e cartoni, distribuisce fogli di via e divieti di dimora che non fanno altro che spostare il problema di qualche isolato, senza mai affrontarlo davvero. L'obiettivo non è mai quello di risolvere, ma semplicemente di nascondere, di far sparire ogni traccia, ogni presenza scomoda, allontanandola dagli occhi di tutti.
Eppure, le persone senza dimora restano tali, continuano a vagare in cerca di un rifugio, un pasto, un abito pulito. Ognuno porta con sé i propri problemi : c'è chi combatte con problemi fisici, chi con disturbi mentali, chi con un'umana tristezza, chi con la rabbia per tutto ciò che ha perso o per il tempo che non ha mai avuto. Ma tutto questo, agli altri, sembra non importare.
È una sera come tante, eppure la stazione è stranamente silenziosa: tre auto della polizia, due della guardia di finanza e una volante dei carabinieri presidiano lo spazio ormai svuotato. Non si sentono voci, non si vedono bottiglie né musica; solo qualche figura solitaria in attesa del proprio autobus per tornare a casa. Ma basta spostarsi di pochi metri, oltre l'area controllata, e loro sono ancora lì: seduti per terra, appoggiati ai muri, accolti in qualche struttura d'emergenza o costretti a reinventarsi un rifugio, solo un po' più lontano dal precedente. Ci sono ancora, anche se nessuno vuole vederlo.
Come una nave fantasma, tutte le anime non mollano, continuano imperterrite la loro navigazione cercando di stare a galla anche se il mare è mosso, nonostante la forza delle onde. A volte la tempesta sembra acquietarsi, ma è solo un inganno, un attimo di tregua che non dura, eppure nemmeno questo riesce a fermarli. Le loro barche sono consumate dal tempo, corrose dal sale e dalle botte prese lungo il cammino, eppure sono ancora lì, a galleggiare con ostinazione, a restare a pelo d'acqua come se affondare non fosse mai stata davvero un'opzione. Resistono in silenzio, ma con forza. La società le tratta come rifiuti, come presenze di troppo da eliminare, ma loro non scompaiono: fanno di tutto per restare visibili, per dire "ci sono anche io", per continuare a vivere e a combattere, anche se lontano dagli occhi di tutti, anche se costantemente respinti.
È questo il grande paradosso della società moderna: rimuovere la fragilità perché fa paura, perché riflette una verità scomoda, perché ricorda che tutti, in fondo, potremmo trovarci sullo stesso vascello alla deriva. E allora si fa finta che non esista, si preferisce un intervento temporaneo ad una reale soluzione, mentre la nave continua a navigare, senza una direzione, senza un porto sicuro in cui attraccare, respinta da ogni istituzione, rimbalzata da un ente all'altro, come se quel carico umano potesse essere scaricato, dimenticato, smaltito. E invece resta, silenzioso ma testardo, vivo.